Une voie de recours dédiée aux conditions indignes de détention: vraie avancée ou impasse contentieuse?

Mouchette Julien

 Le 2 octobre 2020, le Conseil constitutionnel a formulé un constat : « aucun recours devant le juge judiciaire ne permet au justiciable d’obtenir qu’il soit mis fin aux atteintes à sa dignité résultant des conditions de sa détention provisoire »[1]. Ce silence de la loi est contraire au principe constitutionnel de « sauvegarde de la dignité de la personne humaine contre toute forme d’asservissement et de dégradation »[2]. Ainsi, en n’ayant pas prévu une telle voie de recours au bénéfice des détenus, le législateur a méconnu l’étendue de sa compétence. Partant, le Conseil constitutionnel a déclaré contraire à la Constitution le second alinéa de l’article 144-1 du code de procédure pénale (CPP), qui détermine les conditions de la mise en liberté de l’individu dans le cadre d’une détention provisoire. En différant l’abrogation de cet alinéa au 1er mars 2021, le Conseil laissa au législateur le temps nécessaire pour se saisir de la question. Ce qui fut chose faite, à l’initiative du président de la commission des lois du Sénat, par le dépôt d’une proposition de loi, début février 2021, visant à créer un recours juridictionnel dédiée aux conditions de détention indignes. Suite à l’engagement de la procédure accélérée par le gouvernement le 18 février, la proposition fut adoptée définitivement le 30 mars et la loi promulguée le 8 avril 2021[3]. Or, ce qui devrait constituer une avancée majeure dans la protection des droits des personnes détenues soulève au contraire de vives inquiétudes chez les associations de défense des droits des personnes en prison et a suscité des prises de position sévères de la part de Dominique Simonnot, l’actuelle Contrôleuse générale des lieux de privation de liberté (CGLPL)[4], et de la part de la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH)[5].

Le constat du Conseil constitutionnel n’est pas inédit. L’année 2020 a été marquée par plusieurs décisions juridictionnelles qui ont ciblé l’absence de mesures en France permettant de garantir, en toutes circonstances, dans les établissements pénitentiaires des conditions de vie dignes. La plus retentissante – et aussi la première – est la décision J.M.B. de la Cour européenne des droits de l’homme (Cour EDH) du 30 janvier 2020[6]. Saisie par 32 personnes détenues dans six établissements pénitentiaires, la Cour a jugé que la majorité d’entre elles avait subi des conditions de détention indignes en violation de l’article 3 de la Convention ; et qu’aucune d’elles n’avait pu obtenir, au moyen des voies de recours existantes en droit interne, la cessation immédiate de ces mauvais traitements. Quelques mois après cette condamnation, dans un arrêt déterminant, la chambre criminelle de la Cour de cassation a saisi le Conseil constitutionnel des deux questions prioritaires de constitutionnalité qui ont abouti à la décision évoquée plus haut ; et, surtout, dans le même temps, a créé en urgence, et en dehors du cadre légal applicable, un mécanisme d’examen des conditions de détention des personnes incarcérées dans l’attente de leurs procès. La Cour de cassation tira donc les conséquences de cette condamnation pour absence de voie de recours effective ; alors même que, dans sa jurisprudence antérieure, elle s’était montrée peu concernée par l’indignité des conditions d’incarcération des détenus[7].

L’arrêt J.M.B. est d’autant plus important qu’il marque un tournant dans l’appréhension de la situation française par la Cour. En effet, celle-ci, sur le modèle des arrêts pilotes, appelle explicitement à résoudre le problème structurel à l’origine des nombreuses saisines de détenus sur le terrain de l’article 3 de la Convention, à savoir : la surpopulation carcérale. Il en ressort que la création d’une nouvelle voie de recours individuelle, si elle apparaît nécessaire, ne sera pas suffisante à endiguer un phénomène général et endémique. Dans les rapports nationaux et internationaux traitant des conditions de détention en France, la surpopulation chronique est présentée comme étant la principale cause de la dégradation de ces conditions. Et, sur ce sujet, le tableau des prisons françaises est noir : vétusté, insalubrité, absence d’intimité générant violences et tensions, carences d’activités, inondations et absence de lumière suffisante pour lire ou écrire ; etc. Cet arrêt de la Cour EDH, pour ce qu’il est – un appel à la réforme structurelle -, a conjuré un temps le pessimisme de celles et ceux qui luttent pour l’amélioration des conditions de détention et qui, depuis de longues années, se heurtent à ce que Robert Badinter a appelé la « loi d’airain »[8] ; et qui repose sur le constat qu’il n’est pas permis d’espérer, dans un pays, accorder aux détenus un traitement plus favorable que le niveau de vie du plus pauvre des travailleurs. Face à cela, cette condamnation, obtenue au prix d’une véritable « guérilla contentieuse »[9] menée par des associations reconnues telles que la section française de l’observatoire international des prisons (OIP), a été décisive dans le parcours juridictionnel et, aujourd’hui, législatif de la question des conditions de détention.

En dépit de ce parcours et de l’objectif poursuivi, la nouvelle voie de recours, telle qu’elle est proposée, est loin de faire l’unanimité. À l’origine, le constat partagé par les institutions et les associations œuvrant pour la défense des personnes incarcérées est qu’à ce jour aucune des voies de recours existantes ne permet de mettre fin à des conditions dès lors que la principale cause est d’ordre structurel (Partie I). Ce nouveau recours ne peut pas représenter une réponse adaptée si justement il fait l’impasse sur le contexte national de surpopulation carcérale et que, au contraire, il ajoute des dispositions risquant de porter atteinte aux droits fondamentaux des personnes incarcérées, parmi lesquels le droit au respect de leur vie privée et familiale (Partie II).

Partie I – Un constat : l’inefficacité préventive des voies de recours ordinaires

La nécessité d’une nouvelle voie de recours s’explique pour deux raisons principales : l’inefficacité des référés administratifs (A) et l’aspect essentiellement complémentaire du recours indemnitaire qui, s’il permet de réparer une atteinte à la dignité, ne suffit pas à faire cesser des atteintes dès lors que celles-ci perdurent (B).

A. Des procédures d’urgence à l’efficacité limitée

Jusqu’à l’adoption de la proposition de loi créant un nouveau recours[10], les référés administratifs représentaient, une décennie après leur création par la loi du 30 juin 2000[11], le moyen contentieux le plus adapté pour lutter contre les conditions de détention jugées indignes. Le juge des référés est intervenu pour la première fois en 2012 suite à la dénonciation publique par le Contrôleur général des lieux de privation de liberté (CGLPL)[12], photos à l’appui[13], de « l’effroyable prison »[14] des Baumettes à Marseille. S’appuyant sur les recommandations du CGLPL, plusieurs organisations et associations, dont l’OIP, avaient demandé au juge des référés du tribunal administratif de Marseille d’enjoindre l’administration à adopter toutes les mesures de nature à faire cesser l’atteinte, sur le fondement d’une requête en référé-liberté[15]. Constatant son bien-fondé, ce dernier ordonna des mesures visant à l’amélioration des cellules, l’enlèvement périodique des détritus et, notamment, la distribution organisée de repas chauds ; et, en appel, le Conseil d’État ajouta la dératisation et la désinsectisation des locaux[16]. Ces ordonnances ont été présentées, à l’époque, comme une avancée notable puisque, pour la première fois, des obligations étaient imposées à l’administration pénitentiaire pour remédier à l’indignité des conditions d’incarcération[17]. Indéniablement, ces ordonnances ont élargi l’horizon de la défense des droits des personnes détenues et auguraient un abondant contentieux de l’urgence dans ce domaine.

Toutefois, l’enthousiasme est resté mitigé[18]. Notamment, en raison de l’interprétation restrictive que le Conseil d’État a adoptée de l’office du juge des référés, dans une ordonnance du 28 juillet 2017 à propos de la maison d’arrêt de Fresnes. Selon cette jurisprudence, le juge des référés ne peut prescrire que des mesures susceptibles d’agir très rapidement sur la situation et non des « mesures d’ordre structurel reposant sur des choix de politique publique insusceptibles d’être mises en œuvre »[19]. Ce qui, en l’espèce, excluait « la réalisation de travaux lourds au sein de la maison d’arrêt de Fresnes », l’allocation « aux services judiciaires et pénitentiaires des moyens financiers, humains et matériels supplémentaires », et notamment « que soient prises des mesures de réorganisation des services ainsi qu’une circulaire de politique pénale »[20]. Cette distinction repose, en partie, sur une réticence du Conseil d’État à imposer à l’administration des mesures d’une ampleur telle qu’elle ne serait pas à même de les assumer[21]. Il en résulte donc que le juge adapte son office aux moyens de l’administration, ce qui lui a été reproché par la Cour EDH dans son arrêt J.M.B.[22]. De plus, cette distinction génère des différends d’appréciation sur ce qui relève ou pas d’une mesure d’ordre structurelle. Récemment, le juge des référés a pu considérer que la demande visant à remédier à l’absence d’eau chaude dans les douches du centre pénitentiaire de Faa’a Nuutania en Polynésie française « porte sur une mesure structurelle et n’est ainsi pas au nombre des mesures d’urgence que la situation permet de prendre utilement dans le cadre des pouvoirs [du] juge des référés »[23] ; alors que, dans la même ordonnance, il estime que « la présence d’eaux souillées dans la cour de promenade », lesquelles résultent d’un « problème structurel d’inclinaison des canalisations d’évacuation des eaux usées », constitue des traitements inhumains et dégradants qui justifie d’enjoindre l’administration « d’augmenter la fréquence de curage des canalisations »[24]. Ces nuances ne sont pas toujours aisées à saisir ; et participent à affaiblir la portée du référé-liberté en ce qu’il ne garantit pas à une personne détenue d’obtenir de l’administration tous les travaux nécessaires à l’amélioration de ses conditions matérielles de détention.

À côté du référé-liberté, la procédure du référé-mesures utiles est nettement moins utilisé. Prévu par l’article L. 521-3 du CJA, ce recours, conditionnée par l’urgence, permet de demander au juge d’ordonner toutes mesures utiles, sans faire obstacle à l’exécution d’aucune décision administrative. Le relatif désintérêt pour cet outil s’explique en raison notamment de son caractère subsidiaire. Dans une décision du 5 février 2016, le Conseil d’État a rappelé le principe selon lequel le juge, « saisi sur [le fondement de l’article L.521-3 CJA], ne peut prescrire les mesures qui lui sont demandées lorsque leurs effets pourraient être obtenus par les procédures de référé régies par les articles L. 521-1 et L 521-2 »[25]. De plus, à l’instar de la jurisprudence relative au référé-liberté, le Conseil d’État a restreint le champ d’application du référé-mesures utiles en considérant que le juge des référés ne pouvait ordonner « de prendre des mesures réglementaires, y compris d’organisation des services placés sous son autorité »[26].

La Cour EDH a jugé que les deux référés administratifs étaient ineffectifs en pratique pour faire cesser rapidement l’exposition des requérants à un traitement inhumain ou dégradant. En particulier, la Cour considère, d’une part, que le pouvoir d’injonction conféré au juge des référés par la jurisprudence « a une portée limitée, notamment parce qu’il ne lui permet pas d’exiger la réalisation de travaux d’une ampleur suffisante pour mettre fin aux conséquences de la surpopulation carcérale »[27]. Elle observe en outre que le juge fait « dépendre son office du niveau des moyens de l’administration, ainsi que des actes qu’elle a déjà engagés et elle estime que la mise en œuvre des injonctions connaît des délais qui ne sont pas conformes avec l’exigence d’un redressement diligent »[28]. Dans sa décision du 2 octobre 2020, le Conseil constitutionnel dresse le même constat : « les mesures que [le juge des référés] est susceptible de prononcer [sur le fondement des articles L. 521-2 ou L. 521-3 CJA], qui peuvent dépendre de la possibilité pour l’administration de les mettre en œuvre utilement et à très bref délai, ne garantissent pas, en toutes circonstances, qu’il soit mis fin à la détention indigne »[29]. Ainsi, si le référé-liberté constitue, à n’en pas douter, un progrès en faveur du respect de l’article 3 de la Convention, il ne permet pas d’enjoindre à l’administration de réaliser des travaux susceptibles de mettre fin à des conditions de détention indignes ; ce qui renforce l’impression d’impuissance du juge face à cette situation structurelle.

B. Des recours indemnitaires insuffisants

Chronologiquement, le développement du contentieux de la responsabilité de l’État en raison des conditions de détention est intervenu avant celui des procédures d’urgence[30], même si l’usage de cette voie de recours n’en demeure pas moins récent. Ce n’est qu’à l’occasion de l’examen d’un référé provision en 2013[31] que le Conseil d’État a pu se prononcer pour la première fois sur l’existence d’une faute de nature à engager la responsabilité de l’État du fait des conditions indignes de détention[32]. Depuis, l’OIP relève plus d’une trentaine de condamnations sur les cent quatre-vingt-cinq établissements pénitentiaires que compte le parc carcéral[33]. Sous certaines conditions, une personne détenue peut obtenir, en saisissant le juge du fond ou également celui de référé provision, la réparation pécuniaire d’un préjudice qu’elle a subi du fait d’un comportement fautif de l’administration pénitentiaire. Le Conseil d’État a défini un cadre d’indemnisation, jugé conforme aux exigences de la Cour européenne[34], qui consiste à apprécier l’atteinte en tenant compte de la vulnérabilité de la personne détenue ainsi que de la nature et de la durée des manquements constatés. On s’interrogera toutefois sur la possibilité de justifier, au nom du « bon ordre des établissements pénitentiaires », des conditions de détention portant atteinte à la dignité humaine, un droit intangible au sens de l’article 3 de la Cour EDH[35]. À l’occasion d’une affaire portant sur les « dysfonctionnements matériels dans l’aération et le chauffage des cellules ou de certaines douches » de la maison d’arrêt des Hauts-de-Seine[36], il précisera qu’une atteinte au principe de dignité humaine, si elle est caractérisée, engendre, « par elle-même, un préjudice moral sans que la victime ait à en établir l’existence »[37]. Dès lors, s’il revient à la personne détenue de démontrer que ses conditions de détention méconnaissent le principe de dignité humaine, il ne lui appartient pas de prouver l’existence d’un « préjudice moral », ni d’ailleurs son intensité, et ce quelle que soit la durée de détention[38].

Une fois fixé le cadre de caractérisation de l’atteinte, la jurisprudence s’est déplacée sur le terrain de la quantification du préjudice et, plus spécifiquement, du montant de l’indemnisation. Dans ce domaine, la faiblesse et la disparité territoriale des montants alloués par les juridictions du fond a suscité les critiques de l’OIP laquelle relevait que les « indemnités étaient comprises dans une “fourchette”, très basse, allant de 50 à 200 € par mois »[39]. Récemment, à l’occasion de l’affaire Barbotin, la Cour européenne a pu relever « l’extrême modicité »[40] de l’indemnisation allouée par les juges du fond. Selon la jurisprudence Neshkov, la Cour européenne inclut le montant de l’indemnisation dans les éléments constitutifs de l’effectivité du recours au sens de l’article 13 de la Convention[41] ; dès lors, « son insuffisance peut conduire à une violation de la règle de droit prévue par cette disposition ». Cependant, la Cour évalue l’adéquation du montant en cohérence avec le système juridique et les traditions du pays visé par le recours et en tenant compte du niveau de vie du pays ; et ce, « même si cela aboutit à l’octroi de sommes inférieures à celles fixées par la Cour dans des affaires similaires »[42]. Ce qui revient, en l’occurrence, à examiner le caractère « adéquat et suffisant »[43] de l’indemnisation du préjudice en référence aux principes et modalités d’indemnisation du « préjudice moral » en droit administratif français. En effet, il ressort de la jurisprudence du juge administratif que le préjudice qui résulte des atteintes aux droits fondamentaux est amalgamé avec les préjudices psychologiques dans la « masse imprécise du préjudice moral »[44]. Si cette communauté de préjudices est en soi contestable[45], elle a pour conséquence, par un effet de transposition pure et simple, à diminuer l’indemnisation des préjudices résultant d’une atteinte à un droit, aussi fondamental soit-il. La faiblesse de l’indemnisation tient notamment aux réticences séculaires à envisager la réparation de la souffrance morale. Pendant de longues années, la réparation pécuniaire d’un « préjudice moral » – entendu ici comme un préjudice psychologique – n’allait pas de soi, suivant le principe selon lequel les larmes ne se monnaient pas. Depuis, il existe des grilles d’indemnisation permettant l’évaluation de la douleur morale, mais celles-ci favorisent le plus souvent « une évaluation aléatoire ou une réparation amoindrie »[46]. Pour surmonter la critique, le Conseil d’État a défini, dans sa décision du 3 décembre 2018, une grille spécifique d’indemnisation forfaitaire, évolutive et revalorisée chaque année, des conditions de détention indignes : ce qui comprend notamment une hausse incrémentale des indemnisations[47]. La Cour européenne tient compte de cette avancée jurisprudentielle lorsque, dans l’arrêt Barbotin, elle en conclut que « le recours indemnitaire ouvert devant le juge administratif revêt, dans son principe, un caractère effectif »[48].

Toutefois, l’effectivité du recours indemnitaire, telle que constatée dans l’arrêt Barbotin, ne suffit pas à conclure que les victimes de mauvais traitements du fait des conditions de détention qui leur sont imposées disposent d’un système effectif de protection des droits des détenus garantis par l’article 3 de la Convention. En effet, un recours indemnitaire, sans autre voie de recours possible, pourrait être pleinement effectif que s’il permettait de faire cesser rapidement les mauvais traitements dénoncés ; ce qui, au regard de la nature de ce recours, n’est pas le cas. Dans l’arrêt Lienhardt du 13 septembre 2011[49], la Cour EDH rappelle que pour apprécier l’effectivité des voies de recours dans ce domaine, il importe de tenir compte de la situation de la personne victime. En l’occurrence, il convient de distinguer, au moment de l’introduction de la requête, entre la situation d’un requérant dont la violation aurait cessé à l’issue de sa détention et celle d’un requérant qui serait encore détenu dans des conditions susceptibles de porter atteinte à sa dignité. Dans la seconde hypothèse, un recours effectif ne peut pas avoir pour seule vocation que d’obtenir la reconnaissance et la réparation de la violation alléguée, à la supposer établie[50]. En d’autres termes, si le recours indemnitaire est en principe effectif, en ce qu’il est conforme aux critères dégagés par la Cour pour l’analyse des conditions de détention indignes, il n’est pas suffisant dès lors que le détenu est encore incarcéré au moment de l’introduction de sa requête. Ainsi, la Cour EDH considère que les exigences combinées des articles 3 et 13 impliquent la coexistence de façon complémentaire de remèdes préventifs et compensatoires[51] ; « à défaut d’un tel mécanisme, combinant ces deux recours, la perspective d’une possible indemnisation risquerait de légitimer des souffrances incompatibles avec l’article 3 et d’affaiblir sérieusement l’obligation des États de mettre leurs normes en accord avec les exigences de la Convention »[52].

L’un des sujets connexes ici est celui « des fonctions d’un recours compensatoire dans le contentieux où des droits fondamentaux ont été affectés par l’action publique »[53]. En effet, la condamnation de l’État du fait des conditions de détention indignes peut aussi avoir « une dimension punitive et pédagogique »[54] ; autrement dit, au regard du second terme, une fonction préventive. Dans ce cas, le montant de l’indemnisation ne s’apprécierait plus uniquement en tenant compte de son adéquation au préjudice subi, mais au regard aussi de la ou des finalités poursuivies par le recours en plus de sa fonction principale de réparation. Le caractère « adéquat et suffisant » du montant de l’indemnisation devrait être celui qui incite l’État condamné à faire cesser des situations analogues. C’est une fonction de la responsabilité qui, pour certains auteurs, est tout à fait illusoire « dans la mesure où la réparation ne représentera, le plus souvent, qu’une somme anecdotique pour la personne publique responsable »[55]. En tout état de cause, la modicité des montants alloués à ce jour par les juges internes exclut de facto toute hypothèse d’une fonction pédagogique.

Partie II – Une réponse inadaptée: une voie de recours individuelle dissuasive

Les caractéristiques du nouveau recours interrogent à plusieurs égards, qu’il s’agisse des modalités du recours (A) ou de la non-prise en compte du contexte national de surpopulation carcérale (B).

A. Des modalités de recours non conforme aux exigences de garantie des droits

Cette nouvelle voie de recours dédiée aux conditions de détention indignes a été inscrite au second alinéa de l’article 144-1 du Code de procédure pénal (CPP), réécrit pour l’occasion, et au nouvel article 803-8 du CPP. Ce recours consiste, indépendamment des procédures d’urgence évoquées plus haut, à permettre à tout détenu qui jugera ses conditions de détention « contraires à la dignité de la personne humaine » de saisir le juge de l’application des peines[56] ou, s’il est en détention provisoire, le juge des libertés et de la détention[57]. « Si les allégations figurant dans la requête sont circonstanciées, personnelles et actuelles, de sorte qu’elles constituent un commencement de preuve que les conditions de détention de la personne ne respectent pas la dignité de la personne »[58], le juge déclare alors la requête recevable ; et pourra, dès lors, faire procéder aux vérifications nécessaires et recueillir les observations de l’administration pénitentiaire dans un délai compris entre trois et dix jours. Ce n’est qu’à l’issue de ce délai, si le juge constate qu’il n’a pas été mis fin aux conditions indignes, que le détenu pourra : être transféré ; bénéficier d’une libération conditionnelle ; ou d’un aménagement de peine[59].

Si l’introduction d’un nouveau recours visant à garantir le droit au respect de la dignité en détention peut être perçue comme une « avancée majeure »[60], le dispositif actuel est insusceptible de garantir un droit au recours effectif contre des conditions de détention indignes. Au contraire, il est permis d’y voir, à l’instar du CGLPL[61] et de la CNCDH[62], une impasse contentieuse. En effet, si l’exposé des motifs[63] se réfère à la condamnation de la France par la Cour EDH, les modalités du nouveau recours ne tiennent pas compte des exigences visant à garantir l’effectivité d’un tel recours[64], à savoir : la célérité de la procédure d’une part ; et l’indépendance vis-à-vis de l’administration pénitentiaire de l’instance en charge de l’examen de la requête d’autre part[65].

En principe, lorsque des mauvais traitements sont constatés, notamment dus aux conditions de détention, une intervention en urgence s’impose afin d’en faire cesser immédiatement les effets. Dans l’hypothèse moyenne du nouveau recours, la durée entre le dépôt d’une requête par un détenu et l’intervention du juge, si l’administration n’a pas réagi pour faire cesser des conditions de détention indignes, peut atteindre soixante jours. Ce qui, selon le CGLPL, est une « durée excessive »[66] compte tenu de la situation ; et, selon la rapportrice de la commission des lois de l’Assemblée nationale, une « garantie équilibrée » puisque « ces délais sont suffisamment courts pour garantir une action rapide contre une situation inacceptable tout en demeurant raisonnables pour laisser le temps, notamment à l’administration pénitentiaire, de concevoir et de mettre en œuvre la solution la plus adaptée aux circonstances »[67].

Faut-il vraiment « laisser le temps » à l’administration pénitentiaire ? À rebours de cette analyse, la CNCDH et le CGLPL déplorent chacun le rôle qu’occupe l’administration pénitentiaire dans ce dispositif. En effet, contrairement aux référés administratifs, le juge ne pourra enjoindre à l’administration de prendre des mesures déterminées. Il devra se contenter de « faire connaître à l’administration pénitentiaire les conditions de détention qu’il estime contraires à la dignité de la personne humaine » et de fixer un délai au cours duquel l’administration est « seule compétente pour apprécier les moyens devant être mis en œuvre » pour faire cesser l’atteinte[68]. Dominique Simonnot, l’actuelle CGLPL s’étonne dans sa lettre que le « choix des mesures appropriées pour améliorer les conditions de détention échappe au contrôle du juge ». En effet, dans la mesure où les conditions de détention contestées sont « toujours connues de l’administration celle-ci se trouve en situation d’évaluer leur compatibilité avec la dignité de la personne détenue alors qu’elle s’est délibérément abstenue de les améliorer auparavant »[69].

Enfin, le dispositif repose, en grande partie, sur le transfert de la personne détenue d’un établissement pénitentiaire à l’autre, comme solution idoine à des conditions de détention indignes ; puisque, en effet, les perspectives de libération sont réservées aux prévenus et aux condamnées pour lesquels la peine est aménageable. On peut s’étonner qu’une telle proposition ait été sérieusement retenue. Car, d’une part, dans un contexte endémique de surpopulation carcérale à l’échelle du pays[70], rien ne garantit que l’établissement d’accueil présente des conditions de détention plus dignes que l’établissement de départ ; et, d’autre part, comme le souligne la CGLPL, « le recours au transfert pour le règlement de situations individuelles […] ne manquera pas de conduire au placement d’une autre personne dans les conditions contestées par le détenu transféré »[71]. De plus, le principe et les modalités du transfert des détenus, tel qu’il est prévu par la loi, font peser sur les détenus un risque d’atteinte à leurs droits fondamentaux. En effet, le texte ne dit mot, dans l’hypothèse d’un transfert, « du droit à la santé des personnes engagées dans un parcours de soin », « du droit à la réinsertion pour les personnes qui suivent une formation, travaillent ou préparent un projet d’aménagement de peine », des droits de la défense ou de leurs activités rémunérées. La seule exception opposable par le détenu au transfert vise à garantir le droit au respect de la vie privée et familiale. Le texte prévoit qu’un condamné peut refuser le transfert vers un autre établissement pénitentiaire « eu égard au lieu de résidence de sa famille »[72] ; sans prévoir, toutefois, cette possibilité pour un prévenu, lesquels pourront donc « être dissuadé de signaler des conditions de détention indignes, de peur d’être éloignés de leur famille »[73]. En réalité, la procédure de transfert présente de nombreuses lacunes, tant structurelles qu’au regard des situations individuelles, qui en font, in fine, une mauvaise réponse apportée à l’absence de voie de recours préventive en France. L’actuelle CGLPL va plus loin dans sa critique en s’interrogeant sur les finalités visées par cette nouvelle voie de recours en ce qu’elle apparaît « plus comme une mesure susceptible de dissuader d’éventuels requérants que comme une volonté de leur offrir une solution »[74].

À l’opposé de cette solution privilégiant le transfert, la CNCDH recommande sans détour de privilégier les solutions qui consistent à vider les maisons d’arrêt surpeuplées : ainsi « s’agissant d’un prévenu, c’est plutôt la remise en liberté immédiate, le cas échéant sous contrôle judiciaire ou sous assignation à résidence avec surveillance électronique, qui devrait être privilégiée, sous réserve d’une opposition du magistrat en charge de son dossier. Pour les condamnés, le prononcé d’un aménagement de peine devrait être prioritairement envisagé s’ils y sont éligibles »[75].

B. L’évitement de la question de la surpopulation carcérale

Des deux rapports parlementaires relatifs à la proposition de loi créant un nouveau recours, seul un consacre des développements conséquents à la question de la surpopulation carcérale ; en faisant figurer explicitement dans le titre de sa première partie et d’une sous-partie l’idée que « des conditions de détention dégradées [le sont surtout] par une surpopulation carcérale chronique »[76]. Le lien entre les deux phénomènes n’est pas difficile à faire puisqu’il est largement documenté depuis des années dans les travaux, entre autres, du CGLPL[77], du CPT[78], du Défenseur des droits[79], de la CNCDH[80] ou encore d’associations reconnues telles que l’OIP. D’ailleurs, le rapport parlementaire qui le mentionne calque son constat sur celui formulé par la CGLPL dans son rapport thématique, publié en 2018, sur les droits fondamentaux à l’épreuve de la surpopulation carcérale : celle-ci augmente la promiscuité ; accélère la dégradation des locaux ; entraîne d’importantes carences en termes d’hygiène et de salubrité ; aggrave les violences et participe au développement d’un climat de tension permanente ; etc. La surpopulation « non seulement dénature le sens de la peine privative de liberté, mais porte atteinte à la dignité et à l’ensemble des droits fondamentaux des personnes détenues »[81].

S’il est difficile de ne pas faire le lien entre ces deux phénomènes récurrents, c’est que la Cour EDH y consacre de longs développements dans son arrêt J.M.B du 30 janvier 2020 condamnant la France pour l’indignité des conditions de détention imposées à 27 personnes. La Cour relève que la « sur-occupation des établissements concernés […] est un facteur d’aggravation de conditions de détention matérielles indignes » ; et qu’il y a « un lien direct »[82] entre la surpopulation carcérale et la violation de la Convention. Constatant « l’existence d’un problème structurel », la Cour appelle en conséquence l’État français à adopter des « mesures générales » afin d’assurer la « résorption définitive de la surpopulation carcérale » et d’améliorer les conditions matérielles de détention conformément à l’article 3 de la Convention. Elle ajoute également, en lien avec le second fondement de la condamnation – l’article 13 –, qu’il devrait être établi « un recours préventif » ouvert aux personnes dont les conditions de détention sont contraires à la dignité[83]. Il ressort des conclusions de cet arrêt que la seule création d’une voie de recours contre des conditions indignes ne saurait satisfaire les exigences fixées par la Cour EDH, puisque celle-ci identifie précisément la surpopulation comme étant à l’origine des nombreuses affaires individuelles. Si elle n’inscrit pas la France dans la liste des pays visés par un arrêt « pilote » à ce sujet, c’est tout comme. En effet, elle assure depuis un suivi des changements structurels que doit opérer l’État français. Par exemple, l’arrêt Barbotin relatif à l’effectivité des recours indemnitaires se termine par un rappel des réformes nécessaires à engager. La Cour indique qu’elle « ne perd pas de vue » que le sujet de l’effectivité des voies de recours contre les conditions de détention indignes « s’inscrit dans un ensemble de réformes que l’État [français] doit mettre en place pour faire face au problème de la surpopulation carcérale et pour résoudre les nombreuses affaires individuelles nées de ce problème »[84].

Mais de ces appels, le législateur n’en tire, à ce jour, aucune conclusion importante. L’auteur de la proposition de loi, François-Noël Buffet, l’admet sans embarras : « ce texte n’a pas vocation à régler, en général, le problème de la surpopulation carcérale. Il a vocation à répondre à une injonction du Conseil constitutionnel et créer une voie de droit »[85]. En effet, en décidant que l’abrogation du second alinéa de l’article 144-1 du CPP prenait effet le 1er mars 2021, le Conseil constitutionnel imposait au législateur l’adoption d’un mécanisme de recours efficace dans un délai contraint. Ce qui a donné lieu à quelques hésitations. La proposition de loi, déposée le 11 février 2020, ne fait que reprendre le dispositif que le Gouvernement tenta de faire adopter, avant d’y renoncer, dans le cadre de l’examen du projet de loi sur le Parquet européen et la justice pénale spécialisée en décembre 2020[86]. Peu développée, cette proposition n’avait semble-t-il d’autre objectif que de sauver les apparences. Ainsi, peut-on lire, dans un des rapports parlementaires, qu’il aurait été « regrettable de donner l’impression que la France n’apporte pas une réponse rapide à une question qui touche aux droits fondamentaux des personnes »[87]. Qu’importe si la consécration de cette voie de recours individuelle, en plus des défauts évoqués plus haut, ait l’effet d’un pansement sur une jambe de bois, elle sera améliorée, à n’en pas douter, lors de l’examen mi-avril 2021 d’un projet de loi en préparation sur la Justice[88]. Toutefois, les premières annonces faites par le Garde des Sceaux sur ce sujet n’incitent guère à l’optimisme quant à la question de la surpopulation carcérale. En effet, parmi les mesures évoquées, on trouve la suppression des crédits de réduction de peine et la poursuite du programme de construction immobilière visant à augmenter la capacité pénitentiaire[89]. Des mesures fortement critiquées par l’OIP qui considère qu’elles sont « en total décalage avec la situation critique des prisons, et qui pourraient même au contraire l’aggraver »[90] ; et qui, du reste, vont à l’encontre des préconisations formulées par le Cour EDH. Force est d’admettre que l’actuel ministre de la Justice, par ces annonces, ne rompt pas avec une politique pénale répressive qui s’appuie sur l’expansion de la capacité opérationnelle du parc pénitentiaire[91]. Or, « ce choix politique, motivé par la quête de l’encellulement individuel prévu par la loi depuis 1875, méconnaît la tendance sociologique selon laquelle l’accroissement du nombre de places crée un appel d’air propice à l’augmentation de l’effectif carcéral »[92]. Dans ce sens, le CGLPL, dans son rapport de 2018, montre qu’en trente ans, le nombre de places a doublé, passant de 30.000 à 60.000 places, et constate que « la surpopulation n’a jamais été aussi importante ! »[93].

Les solutions sont connues. Par exemple, la CNCDH et le CGLPL recommandent depuis des années de mettre fin à l’utilisation excessive des peines d’emprisonnement et dénoncent la construction de nouveaux établissements pénitentiaires. Dans sa lettre, Dominique Simonnot, l’actuelle CGLPL, rappelle justement que le nombre de détenus a connu une chute historique après le premier confinement sous le double effet du quasi-arrêt des juridictions pendant le confinement et des mesures de libération exceptionnelle en fin de peine. Cette chute montre que la surpopulation n’est pas un phénomène naturel, mais bien la conséquence de choix politiques[94]. À cet égard, elle regrette que « l’expérience tirée de l’ordonnance du 25 mars 2020 portant adaptation de règles de procédure pénale sur le fondement de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19 », prise pour limiter le risque épidémique en détention, n’ait pas été généralisé. Or, depuis, l’inflation carcérale a repris[95] ; la densité au plan national frôle à nouveau les 120 % en maisons d’arrêt.

Pour conclure, raisonnons par analogie : si le référé-liberté n’est pas un recours effectif au sens de la jurisprudence de la Cour EDH car insusceptible de remédier aux effets structurels liés à la surpopulation, la nouvelle voie de recours ne le sera guère plus puisque le dispositif n’intègre pas cette donnée dans l’équation. En outre, à l’échelle de la personne détenue, elle est susceptible de représenter une impasse contentieuse si l’on tient compte de ses possibles effets négatifs sur les droits des détenus : une solution qui s’avérera dans la pratique plutôt dissuasive. En définitive, cet épisode législatif montre que le traitement de la question des conditions de détentions ne pourra faire l’économie d’un traitement global de la question carcérale, et notamment de ce que Didier Fassin appelle le « moment punitif », c’est-à-dire ce moment à partir des années 80 où l’on se met à enfermer plus alors que la criminalité recule[96]. Cette démarche suppose cependant une prise de conscience de la majorité politique que l’impasse contentieuse n’est que le reflet de l’impasse du système carcéral[97].

 

 

 

Auteurs

Julien Mouchette, Maître de conférences en droit public CRDT - Université de Reims Champagne-Ardenne, Membre de la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH).

Pour citer cet article

Julien Mouchette, « Une voie de recours dédiée aux conditions indignes de détention: vraie avancée ou impasse contentieuse ? », Europe of Rights & Liberties/Europe des Droits & Libertés, 2021/1, n°3, pp. 114-127.

Cons. const., décision n° 2020-858/859 QPC du 2 octobre 2020, M. Geoffrey F. et autre [Conditions d’incarcération des détenus], considérant 16.

Ibid., considérant 12.

Loi n° 2021-403 du 8 avril 2021 tendant à garantir le droit au respect de la dignité en détention, JORF n° 0084, 9 avril 2021, texte n° 3.

Lettre du CGLPL au Président et aux membres de la Commissions des lois du Sénat, réf. N° 173516/MS, 2 mars 2021.

CNCDH, Déclaration relative à la proposition de loi tendant à garantir le droit au respect de la dignité en détention, D-2021-2, 25 mars 2021.

Cour EDH, 30 janvier 2020, J.M.B. c. France, req. n° 9671/15 et 31 autres.

N. Ferran, « Combattre la surpopulation carcérale. Les coulisses d’une guérilla contentieuse », Dedans-Dehors (Revue de l’OIP), n° 109, décembre 2020, p. 39 et s.

R. Badinter, la Prison républicaine (1992), Paris, Fayard, 1992, 430 p. « L’exécutif est contraint par le budget, les parlementaires par l’opinion publique. N’espérez rien d’eux », a confié Robert Badinter aux avocats présents. Faut-il pour autant désespérer ? Non, il faut se tourner vers le juge, s’appuyer sur la condamnation de la France par la Cour européenne des droits de l’Homme pour dénoncer les conditions de détention et obtenir la condamnation de l’État (O. Dufour, « Prison : la grande désillusion ? », Gazette du Palais, Actualités professionnelles, 27 juin 2018, dernière consultation le 20 mars 2021).

N. Ferran, art. cit., p. 39.

Proposition de loi tendant à garantir le droit au respect de la dignité en détention, procédure accélérée engagée le 18 février 2021, adoptée le 30 mars 2021.

Loi n° 2000-597 du 30 juin 2000 relative au référé devant les juridictions administratives.

CGLPL, Recommandations en urgence relatives au centre pénitentiaire des Baumettes à Marseille, JORF n° 0284 du 6 décembre 2012, Texte n° 123.

Voir les photos du centre pénitentiaire des Baumettes publiées à la suite des recommandations.

F. Johannès, « Les Baumettes, l’effroyable prison », Le Monde, 6 décembre 2012.

CJA, art. L. 521-2.

CE, ord. réf., 22 décembre 2012, Section française de l’observatoire international des prisons et a., nos 364584, 364620, 364621, 364647, JCP G, n° 4, 21 janvier 2013, p. 139 et s.

« lorsque la carence de l’autorité publique crée un danger caractérisé et imminent pour la vie des personnes ou les expose à être soumises, de manière caractérisée, à un traitement inhumain ou dégradant, portant ainsi une atteinte grave et manifestement illégale à ces libertés fondamentales, et que la situation permet de prendre utilement des mesures de sauvegarde dans un délai de quarante-huit heures, le juge des référés peut, au titre de la procédure particulière prévue par l’article L. 521-2 précité, prescrire toutes les mesures de nature à faire cesser la situation résultant de cette carence » (CE, ord. réf., 22 décembre 2012).

AFP, « Baumettes : la justice ordonne une première amélioration des cellules », Le Monde, 14 décembre 2012.

CE, 28 juillet 2017, Section française de l’OIP, req. no 41067, §11.

Ibid., §9.

N. Ferran, art. cit., p. 41.

Cour EDH, J.M.B. et autres c. France, préc., §218.

CE, Ord., 2 mars 2021, req. no 449514, M. B… A… §16.

Ibid., §11.

CE, Sect., 5 février 2016, req. n°393540, M. A… B…, §3.

CE, 27 mars 2015, req. n° 385332, Section française de l’OIP, §2.

Cour EDH, 30 janvier 2020, J.M.B. et autres c. France, req. n° 9671/15 et 31 autres, §217.

Ibid.

Cons. const., décision n° 2020-858/859 QPC, préc., §15.

Sur ce sujet, voir : J. Schmitz, « Responsabilité de l’État en raison de conditions de détention », AJDA, 2017, p. 637 ; Y. Faure et C. Malverti, « Conditions indignes de détention : le prix du temps », AJDA, 2019, p. 279.

CJA, R.541-1.

CE, Sect., 6 déc. 2013, n° 363290, Thévenot.

Infographie disponible sur le site de l’observatoire international des prisons, 40 prisons condamnées pour conditions de détention indignes[dernière consultation le 20 mars 2021].

Cour EDH, 19 nov. 2020, Barbotin c. France, n° 25338/16 §57.

P. Wachsmann, Les droits de l’homme, 6e éd. p. 73. Les décisions ultérieures à la décision Thévenot du 6 déc. 2013 avaient exclu des justifications susceptibles de limiter l’engagement de la responsabilité de l’État « la protection des victimes et la prévention de la récidive » considérant qu’ils s’agissaient de motifs sans lien avec l’appréciation de conditions de détention.

CE 5 juin 2015, n° 370896, Langlet.

Ibid., §2.

CE 13 janv. 2017, n° 389711.

Cour EDH, 19 nov. 2020, Barbotin c. France, n° 25338/16 §57.

Idem.

Cour EDH, 27 janvier 2015, Neshkov et autres c. Bulgarie, nos 36925/10 et 5 autres, §288.

Cour EDH, Barbotin c. France, préc., §35.

Ibid., §31.

H. Belrhali, Responsabilité administrative, 2e éd., Issy-Lès-Moulineaux, LGDJ-Lextenso, 2020, p. 307.

Ibid.

S. Hourson, « L’indemnisation de la douleur morale », AJDA, 2018, p. 2062.

CE, sect., 3 déc. 2018, n° 412010.

Cour EDH, Barbotin c. France, préc., § 55.

Cour EDH, 13 sept. 2011, Lienhardt c. France, req. n° 12139/10.

Ibid.

Cour EDH, Neshkov et autres, préc., §180.

Cour EDH, 10 janvier 2012, Ananyev et autres c. Russie, req. nos 42525/07 et 60800/08, §98.

Selon les différentes fonctions de l’action indemnitaire telles qu’identifiées par Hafida Belrhali (H. Belrhali, op. cit., p. 56).

H. Belrhali, op. cit., § 58.

S. Hourson, art. cit.

CPP, art. 803-8 (rédaction du texte tel qu’adopté définitivement par l’Assemblée nationale le 30 mars 2021).

CPP, art. 144-1.

CPP, art. 803-8, I.

CPP, art. 803-8, II.

Lettre du CGLPL au Président et aux membres de la Commissions des lois du Sénat, réf. N° 173516/MS, 2 mars 2021.

Ibid.

CNCDH, déclaration relative à la proposition de loi tendant à garantir le droit au respect de la dignité en détention, 25 mars 2021.

Texte n° 362 (2020-2021) de M. François-Noël BUFFET et plusieurs de ses collègues, déposé au Sénat le 11 février 2021 – exposé des motifs.

Cour EDH, J.M.B. c. France, préc.

Ibid.

Lettre du CGLPL, préc.

Rapport n° 3973 de Mme Caroline ABADIE, fait au nom de la commission des lois, déposé le 10 mars 2021, p. 18.

CPP, art. 803-8, I.

Lettre du CGLPL, préc.

CGLPL, Les droits fondamentaux à l’épreuve de la surpopulation carcérale, Paris, Dalloz, 2018, 52 p.

Lettre du CGLPL, préc.

CPP, art. 803‑8, II 3°.

Lettre du CGLPL, préc.

Ibid.

CNCDH, Déclaration, préc.

Rapport n° 3973 de Mme Caroline ABADIE, fait au nom de la commission des lois, déposé le 10 mars 2021, p. 7.

CGLPL, Les droits fondamentaux, op. cit.

Rapport au Gouvernement de la République française relatif à la visite effectuée en France par le Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (CPT) du 15 au 27 novembre 2015, p. 23.

Défenseur des droits, Avis au Parlement 12-02 du 16 octobre 2012 relatif aux moyens de lutte contre la surpopulation carcérale : les moyens de lutte contre la surpopulation carcérale.

CNCDH, Avis sur la question pénitentiaire dans les Outre-mer, 18 mai 2017.

CGLPL, op. cit., p. 7.

Cour EDH, J.M.B. et autres, préc., §315.

Ibid., §316.

Cour EDH, Barbotin c. France, préc., §58.

Interrogé par P. Januelle dans « Un recours juridictionnel en cas de conditions de détention indignes », Dalloz actualité, 8 mars 2021.

Rapport n° 418 (2020-2021) de M. Christophe-André FRASSA, fait au nom de la commission des lois, déposé le 3 mars 2021, p. 9.

Ibid.

J.-B. Jacquin « Les grandes lignes de la réforme de la justice voulue par Eric Dupond-Moretti », Le Monde, 4 mars 2021.

Ibid.

OIP-SF, « Prisons : des annonces en décalage total avec l’urgence », communiqué de presse, 3 mars 2021.

CNCDH, « Réflexions sur le sens de la peine », 24 janvier 2002.

G. Salle, La part d’ombre de l’État de droit. La question carcérale en France et en République fédérale d’Allemagne depuis 1968, EHESS, coll. « En temps et lieux », 2009, p. 236.

CGLPL, Les droits fondamentaux à l’épreuve de la surpopulation carcérale, Dalloz, février 2018, p. 32.

Lettre du CGLPL, préc.

J.-B. Jacquin, « Surpopulation en prison : l’impossible équation d’Éric Dupond-Moretti », Le Monde, 15 février 2021.

D. Fassin, Punir, une passion contemporaine, Paris, Ed. du Seuil, 2017.

Voir, J. Lesage de La Haye, L’abolition de la prison, Paris, Libertalia, 2019, 185 p.

ABSTRACT
By a law promulgated on April 9, 2021, the French parliament has created a remedy that should allow detainees to effectively denounce conditions of detention amounting to cruel, inhuman and degrading treatment. Introduced as a real progress by its advocates, this new remedy raises many criticisms from NGO and Institutions protecting and promoting human rights. Mainly linked to the fact that the solutions brought to the detainees do not take into account the national context of prison overcrowding.


RESUME
Le législateur français a créé, par une loi promulguée le 9 avril 2021, une nouvelle voie de recours devant permettre aux détenus de dénoncer efficacement les conditions de détention indignes. Présentée comme une véritable avancée par ses promoteurs, cette nouvelle voie de recours, dans ses modalités de mise en œuvre et les solutions apportées aux détenus, soulève de nombreuses critiques, principalement liées au fait qu’elle fait l’impasse sur le contexte national de surpopulation carcérale.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

  • Partie I - Un constat : l’inefficacité préventive des voies de recours ordinaires
    • A. Des procédures d’urgence à l’efficacité limitée
    • B. Des recours indemnitaires insuffisants
  • Partie II - Une réponse inadaptée: une voie de recours individuelle dissuasive
    • A. Des modalités de recours non conforme aux exigences de garantie des droits
    • B. L’évitement de la question de la surpopulation carcérale